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Santé et Environnement

Prof Angelo Attinsounon à propos de la mission d’un infectiologue : « …Identifier des situations d’urgence infectieuse pour des actions conséquentes »

Les 2e Journées Nationales d’Infectiologie se sont déroulées à Cotonou du 13 au 15 Mars dernier. L’un des moments forts de l’ouverture de cette rencontre scientifique a été la communication inaugurale placée sous le thème : «Place et rôle de l’infectiologie dans la réduction de l’impact des grandes endémies et pandémies en Afrique» placé dans le contexte béninois. Ladite conférence a été animée par Prof Angelo Cossi Attisounon, Maitre de Conférence Agrégé des Universités du Cames. Il est également membre de la Société Béninoise de Pathologie Infectieuse et Tropicale (SOBEPIT).

Qu’est-ce que l’infectiologie ?

L’infectiologie est une discipline médicale, clinique spécialisée dans la prise en charge des maladies infectieuses et tropicales dans leurs dimensions aussi bien individuelles et collectives. Cela suggère à l’infectiologue d’être un médecin clinicien. Un super clinicien qui assure la prise en charge des patients atteints d’infections, que ça soit d’origine bactérielle, virale, fongique ou parasitaire, des plus complexes aux plus difficiles à traiter et les maladies infectieuses émergentes. Il assure le diagnostic, il a la maitrise des explorations paracliniques pertinentes et connait les indications et les non indications d’un traitement anti infectieux. Il opère un choix raisonné anti infectieux selon les critères multiples et une surveillance efficace de l’efficacité et de la tolérance des traitements anti infectieux. Sa mission est donc d’identifier des situations d’urgence infectieuse pour des actions conséquentes. Il joue un rôle majeur dans la reconnaissance, dans l’alerte, dans la prévention individuelle et collective des maladies transmissibles.
En tant que clinicien de terrain, il a une expertise large en évaluation des impacts écologiques et économiques des maladies infectieuses sur l’environnement et la collectivité. Il s’occupe d’une panoplie de problèmes de santé, que cela vienne du milieu communautaire (d’infections communautaires ou d’infections nosocomiales ou associées aux soins), de pandémies aux endémies, de maladies transmissibles ou contagieuses, de maladies émergentes, négligées, etc. Il faut noter qu’il s’occupe d’une discipline très transversale puis que finalement toutes les autres spécialités d’organes auront à partager avec lui ou très souvent son expertise dans le meilleur des cas des infections de leurs organes respectifs. Il a donc la maitrise de la démarche diagnostic devant ces situations de maladie infectieuse, la gestion et la maitrise des traitements anti infectieux, et surtout la prévention et la promotion de la santé.

Un clinicien-enseignant

Mais sa mission ne s’arrête pas seulement aux soins puis que finalement, la qualité de ses soins va dépendre de la qualité de la formation et de la recherche scientifique. Dans le domaine de l’enseignement, l’infectiologue est après tout un clinicien-enseignant qui va enseigner à tous les niveaux de la formation de base, donner des cours de sémiologie, de pathologie thérapeutique, de la Licence au Doctorat en passant par les DESS et des internes des hôpitaux, et animer diverses formations transversales dans d’autres domaines de spécialité où sa compétence est requise. Mais il est aussi un clinicien chercheur et responsable des instances nationales de recherche en santé…Il peut occuper de hautes fonctions étatiques dans le domaine de la santé, de hautes fonctions institutionnelles, travailler dans des institutions nationales et internationales comme l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), travailler dans des programmes et projets de lutte contre les maladies infectieuses en tant que responsable à divers niveaux, travailler dans des groupes techniques thématiques.

Comment devient-on infectiologue en Afrique francophone ?

Il faut d’abord avoir le Doctorat d’Etat de médecine et aller faire un Diplôme d’Etude Spécialisée (DES) de 4 ans en maladie infectieuse. Un interne des hôpitaux peut aussi s’inscrire en maladie infectieuse. D’une manière ou d’une autre, il finit toujours par faire son DES pendant le cursus de l’internat.

Le rôle et la place des infectiologues dans le système sanitaire béninois

L’Etat des lieux fait par la Société Béninoise de Pathologie Infectieuse et Tropicale (SOBEPIT) montre que nous avons des infectiologues résidents et non-résidents qui œuvrent pour la SOBEPIT. Ce qui est intéressant, c’est que nous couvrons tous les secteurs que je viens de citer. Nous avons des non-résidents en France, au Canada, en Côte d’Ivoire et certains qui sont dans des projets transversaux. En fonction actuellement, j’ai pu identifier 4 à divers niveaux de leur évolution et il faut noter qu’il y a un grand intérêt aujourd’hui à la spécialisation en maladie infectieuse par rapport aux jeunes médecins. En témoigne le nombre de candidatures reçues pour les dernières bourses par le Ministère de la Santé. Mais il faut noter que nous n’avons pas encore un cadre d’expression propre qui nous permettra de nous exprimer et d’apporter le meilleur de nous-mêmes dans le cadre de la prise en charge des patientes. Mais nous coopérons dans une approche partagée.
Dans ce contexte et dans le but de développer cette spécialité, les infectiologues du Bénin ont élaboré le plan de développement de l’infectiologie au Bénin depuis Mars 2021. Dans les domaines de soin, il est important d’assurer la couverture nationale en infrastructure de soins de qualité en infectiologie, d’assurer une couverture nationale en ressource humaine qualifiée pour le diagnostic, la prise en charge des maladies infectieuse, la prévention et les ripostes, de créer un réseau national de laboratoire de microbiologie et de biologie moléculaire pour renforcer la surveillance épidémiologique et le diagnostic précoce des infections à potentiel épidémique.

Les activités à mener proposées par la SOBEPIT

Créer et construire un service moderne de maladie infectieuse dans chaque centre hospitalo-universitaire, recruter et de déployer des infectiologues dans ses services créés et dans les hôpitaux de zone, offrir des bourses de formation de nouveaux infectiologues et créer un réseau national de laboratoire de microbiologie, de biologie moléculaire dont deux de référence, un au sud du Bénin et un au nord. En ce qui concerne la formation, il s’agira d’animer aussi bien les formations initiales de qualité en infectiologie, des formations spécialisées en maladie infectieuse et des formations diplômantes sur plusieurs thématiques d’intérêt.
Pour les activités à mener, il y a également le recrutement d’assistants en infectiologie. Le but ici est de créer un pôle d’excellence, une pépinière qui pourra permettre après, de former de nouveaux infectiologues et de les positionner partout où besoin serait dans le pays, la création de formations diplômantes dans les domaines de compétences spécifiques en infectiologie et la création du diplôme d’étude spéciale de maladie infectieuse qui va permettre de combler le gap en termes de ressources humaines de qualité.

La formation

Concevoir et conduire des produits de recherche de hautes qualités scientifiques sur la prévention et la prise en charge des maladies infectieuses, de renforcer le système de surveillance épidémiologique des maladies infectieuses et de développer la capacité de conduire des essais cliniques et thérapeutiques et vaccinaux, dont des essais de haute qualité scientifique. Et pour cela, la SOBEPIT a proposé la création, la construction, l’équipement et l’opérationnalisation d’un institut national de recherche en infectiologie au Bénin, la création d’un mécanisme de collaboration étroite entre l’Institut National de Recherche en Infectiologie ainsi créée et les services des maladies infectieuses, les services de surveillance épidémiologique et le réseau national de laboratoire. Il faut continuer à former et essayer d’évaluer les pratiques professionnelles à travers le développement professionnel continu et les formations médicales continues à travers les stages de perfectionnement des infectiologues dans des domaines de compétences spécifiques et élaborer des recommandations de pratiques professionnelles dans les domaines de l’infectiologie.

Où en sommes-nous ?

Nous avançons certainement, mais tant que tout n’est pas fait, beaucoup restent encore à faire, aussi bien dans le domaine des soins, de la formation, de l’enseignement et de la recherche. Il va falloir peut-être revoir la vitesse à laquelle nous évoluons pour pouvoir atteindre le but.

Propos recueillis et transcrits par Kanbio24.info

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